: Le nombre d’annonces de locations saisonnières recule à Paris, selon la mairie. Qu’en est-il ?
Bertrand Burdet (directeur général adjoint d’Airbnb France) : La même semaine, trois chiffres différents ont circulé à ce sujet… Chez Airbnb, nous observons à Paris une forte augmentation du nombre de nouveaux hôtes au deuxième trimestre 2022 en comparaison avec 2021, grâce notamment à la reprise du tourisme. Par rapport à 2020, nous ne pouvons pas partager de données. Bien sûr, les années Covid ont eu un impact sur Airbnb, l’offre a évolué. De l’interview de Ian Brossat (l’adjoint au logement de Paris, Ndlr), je retiens qu’environ 80% des logements Airbnb sont des résidences principales – ce qu’il dit pour la première fois. C’est assez proche de la vérité.
Bertrand Burdet, DGA d’Airbnb France @ Airbnb
Comment évoluent vos relations avec les villes en France ?
Bertrand Burdet : Aujourd’hui, l’objectif d’Airbnb, c’est de créer des partenariats avec les villes, de les accompagner. La réglementation française est d’ailleurs très mature – ce qui n’est pas le cas au Portugal, en Espagne, en Italie ou en Angleterre. C’est assez simple, sur tout le territoire : jusqu’à 120 jours de location pour une résidence principale, et pas de limitation pour les chambres chez l’habitant. Sur les résidences secondaires, le pouvoir est laissé aux élus locaux, qui peuvent ainsi réguler en fonction de leur situation locale.
Des villes se plaignent d’immeubles entiers de logements Airbnb. Comment réguler ?
Bertrand Burdet : Bien sûr, nous sommes contre la spéculation immobilière. En revanche, il ne faut pas empêcher un petit propriétaire de mettre sa maison familiale sur Airbnb. Sinon, sa propriété va souvent garder les volets clos. Nous devons trouver un point d’équilibre entre le développement du tourisme et l’accès au logement. La Baule, par exemple, oblige les propriétaires gérant plus de deux résidences secondaires en meublés touristiques à faire de la compensation. C’est équilibré. Le pays basque, lui, interdit complètement les meublés touristiques. C’est une position extrême qui n’aura selon nous aucun impact sur le logement. Val d’Europe a voulu instaurer des quotas par quartier, ce qui a été contesté. La décision a été suspendue.
Il y a une réglementation sur les résidences secondaires, avec compensation. Utilisons-la.
Vous êtes contre les quotas par quartier, même dans les zones sous tension au niveau du logement ?
Bertrand Burdet : Nous sommes totalement contre les quotas par quartier, qui créent des inégalités entre propriétaires. Il y a une réglementation sur les résidences secondaires, avec compensation*. Utilisons-la. Il faut utiliser les outils qui ont déjà fait leurs preuves.
Vous êtes donc ouverts à la compensation ?
Bertrand Burdet : La compensation est un très bel outil pour un maire qui souhaite réguler les résidences secondaires. C’est un levier adaptable en fonction de la tension de logement et du développement touristique.
Airbnb a annoncé un été record au niveau mondial. Quelles sont les tendances en France ?
Bertrand Burdet : Nous sommes très satisfaits de l’été, le chiffre d’affaires mondial a progressé de 30%. En France, nous constatons une appétence pour les destinations rurales. Environ 20 000 villages disposent d’ailleurs de logements Airbnb. Nous observons une deuxième tendance : l’essor des séjours à moindre coût. Les recherches de chambres chez l’habitant** et de grandes maisons pour les groupes augmentent. Cette tendance devrait se poursuivre compte tenu des tensions au niveau du pouvoir d’achat, notamment à l’approche des Jeux olympiques 2024. Troisième tendance, les séjours très longs, de plus de 28 jours, se développent.
Nous prenons notre part d’engagement dans la protection de ce patrimoine rural.
Le rural, c’est aussi ce qu’a souhaité développer Emmanuel Marill dès qu’il a pris ses fonctions de directeur général d’Airbnb en France…
Bertrand Burdet : Oui, c’est le mouvement amorcé par Emmanuel Marill dès 2016. Depuis trois ans, nous allons plus loin dans cette voie. Nous prenons notre part d’engagement dans la protection de ce patrimoine rural. Dans cet objectif, nous avons fait un don de 5,6 millions d’euros à la Fondation du patrimoine. Il n’est pas question ici d’aider (le château de) Versailles, mais des lavoirs, des églises, des moulins, etc. Ce qui fait le charme de la destination France. Nous avons aussi créé une catégorie « Patrimoine » qui rassemble 15 000 logements en France. Dans un premier temps, nous l’avons déployée uniquement en France, avant de l’étendre à l’Europe.
Comment êtes-vous organisés en France ?
Bertrand Burdet : Notre bureau à Paris emploie environ 70 personnes. C’est aussi un lieu de rencontre, avec les équipes, les partenaires, les hébergeurs. La France est un marché très important pour Airbnb, ce qui nous permet d’avoir une certaine latitude pour lancer des produits spécifiques. Nous avons trois piliers : le rural et le patrimoine, l’environnement, les Jeux olympiques pendant lesquels nous pensons accueillir massivement des voyageurs. Sur l’environnement, nous aidons les hébergeurs à se lancer dans la rénovation énergétique. Nous leur accordons pour leurs travaux de 1000 à 2100 euros, en plus des aides gouvernementales. C’est un dispositif pilote en France, ainsi qu’en Angleterre.
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Airbnb et VMF Patrimoine partenaires
A partir du 12 décembre 2022, les propriétaires de biens patrimoniaux souhaitant effectuer des travaux de rénovation pourront candidater au prix « VMF–Airbnb patrimoine bâti et tourisme ». Ce prix de 40 000 euros, financé par Airbnb, permettra à VMF de soutenir un à deux projets dans l’Hexagone.
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*La compensation consiste à convertir des surfaces commerciales en logements, afin de compenser la perte de surfaces d’habitation liée à la création d’un meublé touristique.
**Les nouvelles annonces de chambres privées sont en hausse de 30% entre le troisième trimestre 2021 et le troisième trimestre 2022 en France.
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